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Butembo : fabriquer soi-même son véhicule 



Avec un peu de génie et beaucoup de persévérance, deux mécaniciens de Butembo dans le Nord-Kivu, ont chacun réussi à construire leur véhicule. Faits de bric et de broc, ils permettent à leurs propriétaires, soudeur et transporteur, de bien gagner leur vie. Un exemple de débrouillardise qui donne des idées…

Sur l’avenue du marché au centre-ville de Butembo, un attroupement peu ordinaire se forme rapidement. Au milieu de la foule accourue, un véhicule hors du commun attire la curiosité de tous. Son fabriquant, Katembo Kavulyoto, l’a baptisé Volcan. En fait de véhicule, il s’agit d’un assemblage de bric et de broc en bois et en ferrailles, montés sur un châssis d’une Volkswagen (VW). L’engin roule avec un moteur électrique chinois Shangfa, généralement utilisé ici pour fournir l’électricité. Mécanicien auto au départ avant de devenir soudeur, Katembo a adapté ce moteur qui est relié à un alternateur de 5 KVA. Une boite de vitesse couplée à un régulateur de pression fait déplacer l’engin, qui roule à bonne vitesse et escalade même des pentes raides.
"Cela me fait énormément plaisir de voir les gens s’intéresser à ce que je fais", s’exclame ce mécanicien, habitué à ce genre de scène. Partout à travers la ville, son véhicule attire des dizaines de curieux qui viennent admirer son invention. Un autre véhicule également bricolé de toutes pièces fait aussi sensation dans cette ville de la province du Nord-Kivu, située à 320 km au nord de Goma. Il est presque entièrement en bois ce qui en étonne plus d’un. Mais il roule grâce à un moteur et un vieux radiateur de Toyota, montés sur un châssis en bois dur. "J’ai toujours rêvé d’avoir mon propre véhicule", explique son inventeur, Kalos Kalembo, qui désigne, lui, son engin du nom de Griki, en mémoire, dit-il, des voitures en bois qu’il fabriquait pendant son enfance.

Devenir son propre patron

Gagnés par un esprit d’indépendance manifeste, Kalos et Kavulyoto, tous deux mécaniciens auto, ont dû forcer leurs talents pour en arriver là. Chacun travaillait avant dans un garage, mais avait l’ambition tenace de devenir un jour autonome. "Je suis heureux que Dieu m’ait donné l’intelligence de monter mon véhicule. Je suis patron de moi-même et je n’ai de comptes à rendre à personne", se réjouit l’inventeur du Griki, qui essaye chaque jour d’améliorer son engin depuis qu’il l’a fabriqué en 2003.

Avec ce véhicule qui tracte une grosse charrette, il transporte du bois de chauffage, des planches et des matériaux de construction. Il peut aller loin dans les faubourgs de Butembo. "Je n’ai pas peur des routes des villages", rassure Kalos, qui se dit en mesure d’aller chercher toute marchandise partout où on le lui demande. "La consommation du véhicule est vraiment modeste. Avec 5 litres d’essence, je fais des affaires", affirme ce mécanicien la quarantaine révolue, qui gagne 20 $ par course en moyenne. "Tout se passe bien avec Kalos. Avec lui, on sait s’arranger", témoigne un briquetier, qui reconnaît que transporter du bois de chauffage par Griki lui coûte moins cher que par camion ordinaire.
Reconverti en soudeur, le propriétaire du Volcan est, lui, sollicité de partout, principalement pour effectuer des travaux de soudure des portes métalliques en ville. "Avec mon véhicule, je suis rapide pour aller où le travail m’appelle. Je peux ainsi me déplacer avec tout mon matériel…", raconte Kavulyoto en démarrant son engin à l’aide d’une manivelle, avant de repartir dans un nuage de poussière. Son métier lui rapporte entre 7 et 20 $ par jour.

Rudimentaires, pas ridicules

Bien que très rudimentaires, ces véhicules bricolés nourrissent leurs hommes et témoignent de l’ingéniosité de leurs fabricants. Ce dont se félicite d’ailleurs Jacques Kahuko Musienene, le président de la Solidarité des techniciens garagistes (SOLITEC) de Butembo. "Cela prouve, dit-il, qu’ils ont des idées qui peuvent nous aider à avancer."
Dans leur état actuel, les camions made in Butembo ne sont pas couverts. Lorsqu’il pleut, tout le monde est trempé. Ce qui ne démoralise pas, pour autant, leurs propriétaires. "Etre mouillés ? Cela ne change rien. Notre seule détermination est de bien faire notre travail", réagit Kalos, qui déclare consacrer une bonne part de ses revenus à l’entretien régulier de son outil de travail. "Si l’Etat soutient leur initiative, ils sont capables de mieux faire", suggère Kakule Salamuli, qui travaille dans la vente des planches, émerveillé par la débrouillardise de ces deux mécaniciens bricoleurs.

Anani

 
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